Gander et Mirabel : aérogares en péril

Y a-t-il une quelconque concordance entre l’annonce récente par les autorités portuaires compétentes de la démolition prochaine de l’aéroport de Gander et celle faite le 1er mai dernier par Aéroport de Montréal (ADM), l’organisme chargé de la gestion, l’exploitation et le développement des deux aéroports internationaux de Montréal depuis 1992, de réserver un même sort à l’aérogare de Mirabel ?

Si l’aéroport de Mirabel concu par l’agence d’architecture Papineau, Gérin-Lajoie, Le Blanc, Edwards et le designer Jacques Guillon est une oeuvre architecturale des plus remarquables, sa position dans les réseaux de transport est fragile depuis toujours. Mis en projet par le gouvernement fédéral à la fin des années 1960 pour faire face à l’accroissement du traffic aérien et accueillir les vols supersoniques, l’aéroport construit au nord de Montréal, sur le territoire de Sainte-Scholastique, fut victime des profonds bouleversements qu’a connu le monde à partir des années 1970.

En cours de projet, son organisation intérieure dû être révisée alors que la sécurité de ce type d’installation devait être renforcée face aux premières menaces terroristes. L’aérogare, ses deux pistes et sa tour de contrôle dessinée par l’agence d’André Blouin n’étaient que les premiers éléments d’un projet d’ensemble qui était trois fois plus grand, avec ses six terminus, dont la mise en chantier avait conduit à exproprier 100 000 acres de terre agricole. Autre événement mondial qui ébranla la raison d’être de l’équipement, avant même qu’il ne soit achevé, fut la première crise pétrolière de 1973 qui contribua à redéfinir l’avenir du transport aérien. Handicap supplémentaire, malgré les 350 millions investis, le première phase du projet réalisée était incomplète, le lien ferroviaire avec Montréal n’ayant pas été complété, même si la gare avait été prévue en sous-sol. Ce n’est pas seulement ses utilisateurs qui trouvaient bien longue la distance routière de près de 60 kilomètres qui le sépare de Montréal. Les compagnies aériennes étaient très insatisfaites des problèmes posés par les correspondances entre les vols transatlantiques et continentaux.

Tous ces facteurs contribuèrent à tuer dans l’oeuf un projet que plusieurs jugeaient pharaonique. Bien maigre était son achalandage annuel de moins de 3 millions de passagers, en regard de la prévision de 20 millions à l’horizon 2000. Avant d’atteindre ce cap, en 1997, Mirabel fut rétrogradé en n’accueillant plus que les vols nolisés, une vocation qui serait de courte durée. En 2003, tous les vols étant rapatriés à l’aéroport de Dorval, renommé en l’honneur Pierre-Elliot Trudeau, le premier ministre qui fut à l’origine de Mirabel, alors que l’aérogare de l’ouest de l’île était l’objet d’un vaste projet d’agrandissement. La commémoration semble indifférente aux anachronismes. Par ailleurs, en dix ans, aucune autre fonction n’a pu être trouvée pour l’aérogare de Mirabel, même s’il fut question un moment question de le transformer en aquarium.

Mais tout le monde n’est pas découragé par les difficultés rencontrées par le recyclage de l’aérogare de Mirabel, à commencer par le maire de la municipalité, Jean Bouchard, comme le rapporte le Journal de Montréal. Il a été rejoint par le maire de Montréal, Denis Coderre qui demande de donner une dernière chance au bâtiment afin de lui trouver une nouvelle vocation. D’ailleurs est-il responsable en regard du développement durable de démolir une telle installation ? Le gâchis doit-il être complet ? FVL-2-04-2014.

Pour sauver l’aéroport international de Gander, une petition adressée au gouvernement de Terre-Neuve et Labrador et au gouvernement fédéral a été mise en ligne.

Pour aller plus loin…

Aéroport de Montréal, en ligne. Consulté le 1er mai 2014.

Concorde-Jet. com, en ligne. Consulté le 1er mai 2014.

Duddin, Jean-Maurice, «L’aérogare de Mirabel transformée en aquarium», Canoe.ca, en ligne. Consulté le 1er mai 2014.

Teisceira-Lessard, Philippe, «L’aérogare de Mirabel sera détruite», La Presse.ca, 1 mai 2014, en ligne. Consulté le 1er mai 2014.

Vanlaethem, France et Sophie Mankowski, dir., Sur les traces du Montréal moderne et du domaine de l’Estérel au Québec / Discovering Modern Montréal and the Estérel Resort in Québec, Bruxelles, CIVA, Montréal, Docomomo Québec, 2007, p. 198-199.